Rien ne peut mieux illustrer le changement de sens dont est progressivement victime le terme glorieux de « philanthropie ». Là où, voici deux siècles, il s'agissait de dire qu'il fallait aimer l'humanité pour elle-même (« La philanthropie est une vertu douce, patiente et désintéressée », selon l'Encyclopédie de D'Alembert), on ne voit plus que les dons que tout contribuable peut faire et fait, par chèque, aux alentours de Noël, à l'une ou l'autre des multiples ONG qui se proposent d'alléger les souffrances des laissés pour compte ou des réfugiés, en Europe et surtout en Afrique. En contrepartie, le donateur paie moins d'impôts. La charité fait un mariage de raison avec l'optimisation fiscale. Ne pas s'en plaindre. Le Grand Orient lui-même a créé une fondation qui, depuis de nombreuses années, soutient des projets éducatifs ou sanitaires soigneusement sélectionnés dans les pays dont les besoins sont les plus criants. Par ailleurs, des frères, plus nombreux qu'on ne le croit, créent leur propre structure et bâtissent, qui une école, qui un dispensaire, en payant les matériaux, les médicaments ou l'instituteur avec les dons qu'ils recueillent. On imagine mal la somme d'efforts, de patience et de dévouement qui s'avère nécessaire, face aux difficultés administratives, religieuses et/ou bellicistes, pour achever un projet qui, pour perdurer, devra être pris en charge par ceux à qui il va changer la vie. La franc-maçonnerie a pour objet d'« améliorer l'homme et l'humanité. » Comme le dit la philosophe Françoise Bonardel, invitée par la loge Les Zélés Philanthropes à redéfinir la philanthropie, « on aura beau vouloir le bien des hommes en général, il n'en restera pas moins à le réaliser en particulier. » Comment n'en serions-nous pas conscients ?
Le informazioni nella sezione "Riassunto" possono far riferimento a edizioni diverse di questo titolo.